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"La monnaie unique est une fausse bonne idée"


Entretien de Jean-Pierre Chevènement au quotidien Le Progrès, propos recueillis par Dominique Goubatian, jeudi 12 décembre 2013.


Le Progrès: Votre nouveau livre met-il en avant les défauts de l’Europe ?
Jean-Pierre Chevènement:
J’ai voulu comprendre comment l’Europe et la France en étaient arrivées là où elles en sont aujourd’hui. J’ai pris comme point de départ la Première Guerre mondiale. J’ai rapproché deux mondialisations libérales. D’une part, celle qui s’est développée sous égide britannique, dont l’issue a été la guerre de 1914-1918, et d’autre part l’américaine après 1945, qui a conduit à la crise du capitalisme financier et à la montée des pays émergents, au premier rang desquels la Chine.

Vous dites que l’Europe est sortie de l’histoire. Pourquoi ?
On voit bien que l’Europe actuelle ne marche pas. Élargie à 28, l’Europe a des divergences d’intérêts et des lenteurs de réactions qui génèrent une véritable impotence stratégique.

Pour quelles raisons êtes-vous critique sur la monnaie unique ?
La monnaie unique est une fausse bonne idée. Elle est viciée dans son principe car elle juxtapose en son sein des économies nationales hétérogènes. L’euro est une monnaie surévaluée. Il faut réformer l’euro afin de le ramener à un cours tolérable.

La croissance va-t-elle revenir en Europe ?
Nous sommes à 0 % de croissance. Nous sommes devant la perspective d’une stagnation de longue durée. Nous vivons ce que le Japon a vécu pendant deux décennies.

Êtes-vous inquiet face au mécontentement qui monte en France ?
La France vit un mécontentement permanent. Il y a à cela de bonnes et de mauvaises raisons. Il faut une vision et des choix. Si l’Allemagne ne joue pas les locomotives de la croissance, si la Banque centrale européenne n’injecte pas de crédits supplémentaires dans le circuit économique, alors il faudra renégocier avec l’Allemagne la nature même de l’euro pour en faire une monnaie commune. La monnaie unique n’est pas viable. Nous payons le prix des choix erronés faits il y a plusieurs décennies.

Vous êtes président d’honneur du Mouvement républicain et citoyen (MRC). Des membres de votre parti seront-ils présents dans des listes de gauche conduites par des socialistes ?
Je soutiendrai mes camarades, tout en sachant qu’il y aura des configurations variables selon les villes.


Mots-clés : 1914-2014, euro, europe
Rédigé par Chevenement.fr le Jeudi 12 Décembre 2013 à 22:46 | Lu 1900 fois



1.Posté par Eric CAVALIER le 13/12/2013 00:14
L'Euro est une monnaie "surévaluée"? Cela dépend pour qui! Pour la France et les pays Latins, oui, et ce, depuis le départ. Pour l'Allemagne et sa zone, elle est sous-évaluée depuis le départ. Ne nous étonnons donc point des résultats 10 ans après... Au passage, cette fracture Nord-Sud de l'Europe rappelle un triste précédent, à savoir celui du Mezzogiorno Italien...et les conséquences sociales ( chômage, paupérisation, émigration ou emplois locaux par la mafia). Il serait bon de noter que le prix Nobel 2010, Sir Christopher Pissarides, professeur à la London School of economics and récemment a récemment reconnu qu'il s'était trompé et demande le démantèlement ordonné de l'euro. Détail intéressant: c'est un cyprio-britannique... (voir lien du 12 décembre: http://www.telegraph.co.uk/finance/economics/10512678/Dismantle-the-euro-says-Nobel-winning-economist-who-once-backed-currency-union.html)

2.Posté par Carl GOMES le 14/12/2013 01:39
L'euro, autrement dit l'euro fort, l'idée de François Mitterrand et Giscard d'Estaing, est une mauvaise idée. Et Chevènement a été un des seuls à s'élever contre ceci. La différence euro-dollar a même culminé à 60% en 2008 .
L'euro fort conduit des états comme la France - c'est à dire à économie essentiellement industrielle et agricole - à acheter au lieu de produire; c'est à dire importer (s'appauvrir) au lieu d'exporter (créer de la richesse).
Mais les "élites françaises" croient toujours le contraire. Et que heureusement qu'on a l'euro!!!. François Baroin a déclaré quand il était encore ministre des finances que la sortie de l'Euro donnerait une inflation à 2 chiffres, et des faillites d'entreprises par milliers, etc...

3.Posté par Eric CAVALIER le 14/12/2013 22:23
En effet, les "élites" Françaises sont toujours pour l'euro (1) par mysticisme, car cette monnaie est devenu un dogme religieux pour eux (2) par vanité car ils ne veulent pas reconnaître leurs erreurs et paraître se dédire (3) par cohérence de façade '" l'euro ayant été vendu sur un espoir de croissance/prospérité/emploi/sécurité etc.etc.", donc sortir de l'euro apporterait l'inverse de leurs promesses. Le fait que les promesses aient été démenties dans les faits ne les ébranlent pas car au nom des (1) et (2), les problèmes actuels sont imputés à d'autres causes et ils continuent d'attiser les peurs sur la sortie de l'euro. Il y a en effet une caractéristique inhérente à toutes les élites plus préoccupées de leur sort que de celui de la collectivité: il s'agit de la lâcheté, de la couardise, du refus de faire dissidence au nom d'une solidarité de groupe et d'une forme d'intoxication collective ("groupthink"); on préfère ne pas prendre de risque et se tromper à plusieurs -tout le monde étant responsable, personne ne le sera individuellement- plutôt que d'avoir le courage de se démarquer et de s'opposer au groupe d'intérêt. De ce point de vue, les Anglais n'ont pas commis cette même erreur et au moins ont-ils eu le courage d'assumer la responsabilité de leurs propres choix sans demander la permission à autrui.

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