Carnet de Jean-Pierre Chevènement

La petite différence qui échappe à Michel Rocard


Michel Rocard est fidèle à lui-même en réclamant une alliance, dès avant le premier tour, entre sociaux-démocrates et démocrates-sociaux.


Il entonnait déjà des odes au marché dans les années soixante-dix, alors que les conditions de la mondialisation libérale se mettaient en place. Il fut le chantre du social-libéralisme, avant que celui-ci ne creuse un abîme entre la gauche et les couches populaires.

Toujours à contretemps, Michel Rocard confond l’élection présidentielle avec une discussion programmatique, telle qu’il s’en noue quelquefois entre les deux tours d’une élection municipale.

L’erreur de Michel Rocard s’énonce simplement : sur le fond, il ne voit plus de différence substantielle entre François Bayrou et lui-même. Et cela est vrai : sur l’Europe pour ne prendre qu’un seul exemple. Il oublie qu’il y a peut-être dix à douze millions d’électeurs qui, eux, font la différence et ne voteraient pas Bayrou dans l’hypothèse surréaliste qui sous-tend son appel. Celui-ci pourrait passer pour perfide, s’il n’était d’abord inepte. Seule Ségolène Royal a inscrit son programme dans le dépassement du clivage entre le « oui » et le « non », pour une Europe économiquement, monétairement et socialement redressée. C’est cette petite différence qui échappe à Michel Rocard. C’est elle qui fera la décision.


Rédigé par Jean-Pierre Chevènement le Dimanche 15 Avril 2007 à 21:01 | Lu 8103 fois



1.Posté par 1plus1égale3 le 15/04/2007 23:45
Si l'objectif est de gagner,faut-il nous inspirer de l'"Unione" qui en Italie rassemble la gauche et au delà ? C'est ainsi que les élections 2006 ont permis de d'écarter S. Berlusconi...
Voir l'article L'UNIONE dans wikipedia.fr , avec la liste de la douzaine de partis associés qui ont convaincu les électeurs.
Si 1 parti = 1 électeur
2 partis unis = 3 électeurs

2.Posté par frdricb59 le 16/04/2007 01:02
Et quid de Bernard Kouchner ?

Vous ne pas quand même pas lui faire les mêmes reproches qu'à Michel Rocard.

3.Posté par rajeev le 16/04/2007 08:07
Bonjour,

Les reproches adressés par J.P Chevènement à M. Rocard pourraient s'adresser aussi à Bernard Kouchner ou à Claude Allègre ! Ces gens là refusent de considérer le vote du 29 mai 2005 et pensent qu'il sont représentatifs de tous les soclialistes alors qu'ils représentent qu'une frange minime des socialistes.
On a le sentiment de revivre des débats anciens du PS et ce, à quelques jours de la présidentielle.
La démarche de M. RFocard me paraît être un coup bas à l'égard de Ségolène Royal . Raison de plus pour que ceux qui la soutiennent sincèrement se fassent entendre !!!

4.Posté par Claire Strime le 16/04/2007 08:21
ça ce sont les avatars de l'union de la première et de la deuxième gauche...

Donc l'effet de surprise est à peu près nul!

Fallait-il faire faire les "Assises du socialisme" en 1974 (mais peut-être qu'à l'époque M.Rocard faisait la différence entre lui-même et Lecanuet)?

Ayant obtenu le prompt renfort du bon Allègre, cela ressemble plus à une commémoration de l'offensive Nivelle (voire de l'offensive Broussilov patronnée par l'esprtit génial qu'était Kerenski).

5.Posté par chav le 16/04/2007 08:45
Tout à fait d'accord avec Rajeev.
Il y a même pire sur la forme j'ai appris ce matin que les interventions de ces messieurs étaient décomptées du temps de parole de Ségolène Royal.
On croit rêver.
Si cela ne s'apparente pas à de la trahison je demande ce qu'il faut.

6.Posté par Augustin le 16/04/2007 13:41
On se demandait depuis longtemps ce qu'était la deuxième gauche. on le sait désormais : il s'agit de la gauche de droite et pour tout dire d'une belle somme...nulle. Avanti Sego et le Che. Jusqu'à la victoire!

7.Posté par Claire Strime le 16/04/2007 14:20
Pour comprendre lme sens profond de l'opération Bayrou, je conseille la lecture de l'article du JDD d'hier sur le congrès de l'UOIF.

La république est en danger!!!

8.Posté par Ambiguité le 16/04/2007 15:26
Hé oui, en France, nous n'avons pas de SPD, mais beaucoup de S.P.P.D.D.D. ou "Socialiste Pour Pas Dire De Droite", du genre Kouchner. J'emprunte cette dénomination à Etienne Liebig :-)

Il faut quand même savoir que Kouchner jouit d'une chaire de complaisance au CNAM où il ne met jamais les pieds, mais qui lui verse un salaire très réel. Quant à Rocky, bon, quoi dire ...
Si certains pensent que le renouveau passe par eux, bonne chance les gars ...

9.Posté par Claire Strime le 16/04/2007 15:29
ancien "envoyé spécial de l'ONU" au Kosovo, M.Kouchner ne jouit pas spécialement d'une réputation de distance critique avec les USA

et puis ça s'agite chez les verts européens: tractation pour des alliances avec la droite en Finlande et en Tchéquie, ces "pacifistes" subisent de fortes pressions pour accepter 1 système antimissiles ou la fin de la neutralité

Et dans 1 autre ordre d'idées Cohn-Bendit a déjà réservé ses interventions médiatiques pour le post-22 avril avec l'éternelle antienne de l'alliance centriste moderne.

Bah la simple présence d'Allègre (surement pas préméditée celle-là) suffirait à faire capoter les offensives les mieux ficelées!

10.Posté par MERCIER Jean-louis le 16/04/2007 15:58
Oui, bien sûr, vous connaissez ma grande amitié pour Monsieur Chevènement et l'infini respect que j'ai pour Madame ROYAL et mon admiration, et oui sans limite...

Mais Monsieur ROCARD, avec qui je n'ai pas la même approche, n'a-t-il pas beaucoup de raison pour s'exprimer ainsi ???...

Je ne suis pas dans le secret, puisque depuis 30 ans j'ai pris ma retraite... alors, à la grâce de Dieu !...

11.Posté par LUCAS François le 16/04/2007 17:15
Il y a sans doute, ceci en toute sypathie, beaucoup plus de points communs entre Ségolène Royal et François Bayrou, qu'entre ce que vous avez vous-même écrit dans "Le courage de décider" et "Pour l'Europe votez NON" et le programme défendu par Ségolène Royal, quand vous parliez des gouverrnements Chirac-Jospin, Jospin-Chirac "... Ils mettent en scène leur opposition supposée et réduisent la politique à un théâtre d'ombres". Espérons simplement que Madame Royal, dans sa future grandeur, si elle est élus, ne passera pas outre ce qui c'est passé le 29 mai 2005...

12.Posté par Xavier DUMOULIN le 16/04/2007 19:33
Du gauchisme au centrisme, qu’avez-vous fait de vos vingt ans ?

Je ne porte pas de jugement monolithique et univoque sur les conséquences de l'agitation étudiante et du mouvement social de mai 68. Je retiens, dans la hiérarchie de leurs retombées, les acquis sociaux conjoncturels, en terme de pouvoir d'achat notamment, et structurels avec la reconnaissance de l'expression syndicale dans l'entreprise et surtout la dynamique en oeuvre dans la société civile : place des femmes, contraception, évolution des relations sociales et des rapports d'autorité, etc. . Les idées de mai ont charrié, dans leur sillage, le meilleur et parfois le pire. N'oublions pas aussi l'aspect international de cette contestation des pouvoirs à l'Ouest et à l'Est.

Mon propos s'interresse au substrat idéologique des enfants de mai. Les gauchistes libertaires ont cultivé à l'Université et dans les appareils idéologiques une approche centrée sur l'éclatement des pouvoirs. La contestation s'est organisée sur un mode nouveau : la société civile contre l'Etat, le mouvement social contre les appareils, la base contre le sommet, la périphérie contre le centre, la spontanéité contre l'organisation et le savoir structuré etc. Cette vision manichéenne et simpliste contenait en germe une critique diffuse des institutions, traversant les appareils politiques de la gauche et accompagnant, paradoxalement, le mouvement des idées de la société bourgeoise en quête d'un nouveau libéralisme sans entrave et adapté à la marchandisation du monde. Les idées de mai ont été récupérées par un capitalisme avide de modernisation contre tous les archaismes. Des discours managériaux nouveaux ont éclos dans ce nouvel esprit du capitalisme qui privilégie, dans l'entreprise, l'autonomie et la flexibilité à l'organisation pyramidale et aux rigidités organisationnelles, dans la société, le pédagogisme à la transmission des savoirs, l'individualisme au civisme et à l'engagement collectif, l'émotion à la raison et dans l'économie la main invisible du marché à la rationalité d'une planification démocratique et d'une impulsion de l'Etat.

En politique ces tendances ont eu aussi leurs traductions avec la stratégie de conquête des pouvoirs à la base ("des Lip par millier") sur différents fronts sociaux (les luttes des femmes, des jeunes et étudiants, des gays et lesbiennes, des sans papier, des sans logement, des chômeurs et des précaires… ). Cette stratégie fait souvent l'impasse sur les articulations nécessaires entre les luttes sociales et politiques pour la transformation sociale. Impuissante à changer la donne, elle s'est parfois retournée contre ses protagonistes, isolés, sans perspective syndicale ou sans projet politique. Le néolibéralisme a su parfois phagocyter et pervertir cette démarche dans une modernisation des rapports sociaux. La prédominance du marché et des politiques de l'offre semble devoir s'imposer dans les têtes des élites et des gouvernants en écho à cette critique diffuse de l'Etat et du modèle républicain de régulation économique et sociale. La machine à exclure s'est délestée d'un arsenal protecteur (assouplissement du droit du licenciement, dérèglementation au profit du contrat, organisation flexible, remise en cause du système de retraites par répartition, etc.) quand, dans le même temps, de nouvelles protections ont pu être instituées ou revendiquées. La critique de la société de consommation s'est accompagnée d'une explosion sans précedent de la sphère marchande dans une société de marché inégalitaire et source d'exclusions.

Ce puissant mouvement de libéralisation explique l'entreprise de lliquidation des institutions démocratiques : citoyenneté, République, Etat social, Etat-nation. Ces institutions sont pourtant le legs de la gauche républicaine attachée à la démocratie politique, économique et sociale. Quant au formidable effort de désidéologisation du marxisme, désencombré de la vulgate stalinienne, il est vilipendé par des idéologues repentis de leur effroyable orthodoxie d'hier, aujourd'hui véritables maîtres de la pensée unique. Ce renouvellement de la pensée socialiste offrit pourtant des clefs à la compréhension du monde actuel, complétant utilement les grilles d'analyse marxiste de l'exploitation économique : le phénomène de domination idéologique au travers des écrits d'un Gramsci réhabilité et retrouvé; l'analyse de l'Etat et des rapports de classe dans l'oeuvre de Nicos Poulantzas; la question nationale dans l'austro-marxisme d'Otto Bauer… Le CERES a grandement contribué à ce réveil de la pensée politique critique dans les années soixante dix avant de mettre au coeur de sa perspective socialiste et républicaine la pensée de Jaurès si féconde et toujours incontournable.

Du gauchisme, privé de repères intellectuels pertinents et coupés des couches populaires, à la deuxième gauche, le pas fut vite franchi par les esprits favorables à cette liquidation d'une pensée critique au profit d'un élan messianique hérité du vieux fonds chrétien social. On sait ce qu'il advint de la CFDT recentrée ou du rocardisme, pour ne prendre que ces deux figures emblématiques de la nouvelle gauche dite aussi américaine. Sans doute trop schématisé ici, ce glissement explique la mutation d'une importante fraction des intellectuels issus du gauchisme vers une acceptation des contraintes imposées par la mondialisation libérale. D'où l'évolution naturelle de nos gauchistes vers le centrisme. Car, si l'on devait chercher le trait commun à tous nos recentrés, ce serait peut être celui de leur jeunesse fascinée par le mouvement de mai. Chacun comprendra en quoi le ségolisme, ni gauchiste ni centriste, peut être un jalon utile dans la mutation républicaine et sociale d'une gauche à la croisée des chemins.


13.Posté par Patrice le 16/04/2007 22:19
Avec Kouchner, l'ambassade américaine rentre dans la campagne. Souvenez-vous en novembre, il imaginait un axe Sarko-Ségo ou sarko-Sarko...Ce que ne veut plus Bush? La position de Chirac-Villepin sur l'Irak. Ce qu'il veut? un choix aveuglément atlantiste comme sur le Kosovo...Malheureusement pour lui, l'Espagne a choisi Zapatero et la France désignera une Ségolène Royal lucide et courageuse...Quizz: que votent Kouchner et Cohn Bendit au 1er tour? Seront-ils embedded dans les premiers bombardiers au-dessus de l'Iran?

14.Posté par Elie Arié le 17/04/2007 16:17
Tout cela est bien sympa, mais nous vivons dans la réalité, et la réalité, c'est que:

1- la gauche n'a pu être au pouvoir que lorsqu'elle a fait cohabiter (de façon conflictuelle, les démissions de Jean-Pierre Chevènement sont là pour nous le rappeler) les deux gauches: la vraie, et la "deuxième gache" ou "gauche américaine" de Rocard, Kouchner, DSK, etc; sinon, c'est la cure d'opposition assurée;

2-les élections qui déterminent qui exerce le pouvoir en France, ce ne sont pas la Présidentielles, ce sont les Législatives: si Ségolène Royal est élue, et qu'elle ne veut pas être une Présidente de cohabitation (avec Sarkozy comme Premier Ministre?) il lui faudra une majorité parlementaire, et que celle-ci passe par toutes les tendances du PS, y inclus Rocard et DSK, voire, comme en 1988, des centristes.

Bref: si a gauche remporte les Présidentielles et les Législatives, ne débouchez pas encore le champagne: car c'est là que la vraie lutte va commencer, et elle durera cinq ans.

15.Posté par Augustin le 17/04/2007 16:59
Mais oui , vieil Elie, il faut se battre sans cesse et ne jamais s'en remettre au destin. Je te demande simplement de prendre les batailles l'une après l'autre. Le pessimisme est parfois la fausse excuse des mauvais combattants. Je n'ose te compter parmi ceux-là.

16.Posté par ARNARDI roger le 17/04/2007 17:41
M. Bayrou , ministre de l'éducation Nationale, voulait abroger la loi Falloux de 1850 pour que les collectivités puissent financer sans aucune limite les investissements en faveur des lycées privés. Les propriétaires des bâtiments sont à plus de 95% des congrégations religieuses qui sont les véritables bénéficiaires de ces investissements au travers des loyers qu'elles perçoivent des associations de parents d'élèves gestionnaires. Cela constitue un financement du culte. La manifestation du 16 janvier 1994 à Paris avait mis un coup d'arrêt à cette dérive. M. Bayrou avait dit alors qu'il avait 6 enfants: 3 étaient dans l'enseignement privé et 3 dans l'enseignement public. M. Bayrou n'a pas changé . Les enseignants de l'enseignement public feraient bien de ne pas l'oublier. Avec le projet de constitution européenne qui fait de l'éducation un service, conjugué avec un zélateur de cette même constitution, c'est l'acte de décès de l'Education Nationale et de la République.

17.Posté par Elie Arié le 17/04/2007 20:08
Mon cher Augustin, c'est très énervant d'être taxé de "mauvais combattant" dès l'instant où l'on ne verse pas dans la béatitude de commande.

Alors, juste pour te rafraîchir la mémoire (merci au modérateur de laisser les liens)::


et



et

< http://www.appelcontrelafranchise.org/premiers_signataires.php>

Tu en as fait autant, toi?

18.Posté par Claire Strime le 18/04/2007 12:58
Même grosquinquin s'est énervé et a ressortides références au congrès de Metz (1979) où ils furent pourtant alliés.
C'est vrai que balancer comme ça les frontières issues du mouvement ouvrier maintenant séculaire on voit où ça mène.

D'autant qu'après l'UOIF, c'est au tour de Camdessus de soutenir Bayrou; tout 1 programme!!! (celui du FMI et du "consensus de Washington", qui réussit si bien en Argentine, en l'occurence). Mais quel tango vont ils danser avec Bayrou?


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