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Il est vraiment temps de revoir le traité de Lisbonne, profondément réactionnaire


Entretien de Jean-Pierre Chevènement à la Tribune, 13 février 2010.


Il est vraiment temps de revoir le traité de Lisbonne, profondément réactionnaire
Le sénateur du Territoire de Belfort, président du Mouvement républicain et citoyen, a toujours été opposé à l'euro. Il s'exprime aujourd'hui pour «La Tribune».

La Tribune : Les Vingt-Sept ont exprimé, jeudi, leur soutien à l'égard de la Grèce, qui est aujourd'hui l'économie malade de l'Europe. Cette déclaration ne renforce-t-elle pas la crédibilité de la zone euro ?
Jean-Pierre Chevènement : En premier lieu, il faut d'abord s'interroger sur le cas de la Grèce : ce pays n'est pas, du point de vue de son endettement, dans une situation plus difficile que l'Italie ou la Belgique, et son économie, en termes de PIB, est relativement marginale dans l'Europe. Il est donc surprenant de constater que les agences de notations puissent ainsi lancer la curée contre ce pays, et plus généralement contre la zone euro qui, bien sûr, est une zone économique hétérogène. Il est plus que temps de s'interroger sur le rôle des marchés et de la spéculation. Il suffit de décourager la spéculation, et, parallèlement, d'obtenir des Grecs qu'ils fassent un minimum d'efforts. Ce serait d'autant plus réalisable avec une croissance européenne plus forte et une monnaie moins surévaluée. Deux conditions qui ne sont pas réunies aujourd'hui. Pour deux raisons : les défauts de conception de la monnaie unique, inhérents au traité de Maastricht, et la politique de déflation salariale allemande qui, depuis dix ans, plombe la croissance européenne et creuse les déficits... chez les autres.

Les textes européens interdisent pourtant l'éventualité d'un plan de sauvetage de la Grèce par les États membres...
Évidemment, le traité de Lisbonne est idiot. Son article 123 interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales nationales d'accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions européennes et aux États. Or c'est exactement ce qu'ont le droit de faire la Réserve fédérale américaine ou la Banque d'Angleterre : ne faudrait-il pas, dans certaines limites, s'affranchir de cet article, comme on a su le faire auparavant pour d'autres dispositions du traité ? Prohibition des aides d'État, principe de la « concurrence libre et non faussée », interdiction des déficits budgétaires en dessous de la barre de 3 % du PIB. En fait, on ne compte plus la liste des articles du traité rendus caducs par la crise. Le pacte de stabilité n'y a pas résisté : tous les pays, y compris l'Allemagne, sont sortis des clous. Il est donc vraiment temps de revoir ce traité, profondément réactionnaire.

En même temps, cette crise grecque rend l'euro plus compétitif...
Elle a fait tomber le taux de change de l'euro de 1,50 à 1,36 : en tout mal, son remède ! Mais c'est trop peu ! L'euro est en effet surévalué : 0,82 dollar en 2000, 1,35 dollar aujourd'hui. J'aimerais dire ironiquement : bravo la Grèce, bravo Fitch ! Car un taux de change moins fort ne gênerait pas la Grèce, qui vit en grande partie de ses recettes touristiques. De même, ce serait du pain béni pour les exportateurs comme EADS ou pour notre industrie automobile. Mais l'euro reste une monnaie fragile. Elle est faussement forte : elle est excessivement surévaluée par rapport aux autres grandes monnaies mondiales (dollar, yuan, livre britannique), devenant un lourd handicap pour l'Europe : nous sommes la lanterne rouge de la planète en termes de croissance.

L'euro, selon vous, est donc responsable de cette absence de croissance européenne ?
Oui, car il faut se rappeler que l'Allemagne en 1991 a imposé à ses partenaires ses dogmes et ses choix, lors de la création de l'euro qui est, en fait, un mark bis. Aujourd'hui, l'activité économique dans la zone euro est en outre plombée par la politique économique déflationniste de l'Allemagne... Certes, l'Allemagne affiche un excédent commercial confortable, mais ce surplus se fait pour les trois quarts au détriment des autres pays européens. Même l'Allemagne paye d'une croissance faible et d'un pouvoir d'achat déclinant cette politique salariale et budgétaire excessivement rigoureuse.

Pourquoi, lors de l'adoption du traité de Maastricht en 1992, la France avait-elle accepté cette vision allemande de la zone euro ?
Pour ma part, je m'étais opposé dés le départ à ce traité car le dispositif prévu me paraissait tout à fait déséquilibré. Le président François Mitterrand s'était laissé enfermer dans les règles de la Buba (Bundesbank allemande) par Jacques Delors, qui dirigeait à l'époque la Commission européenne, et par Karl Otto Pöhl, le président de la Bundesbank. Or ce n'était pas raisonnable d'abdiquer sa souveraineté monétaire au profit d'une Banque centrale européenne totalement indépendante et soumise à l'unique objectif de la stabilité des prix. François Mitterrand pensait sans doute qu'on pourrait revoir ce dispositif dans la durée. Il était d'ailleurs prévu une clause de rendez-vous. Celle-ci a bien eu lieu, avec le traité d'Amsterdam et le Pacte de stabilité en 1997. Cela n'a rien changé.

Qu'est-ce qu'il faudrait alors changer dans le fonctionnement de l'euro ?
Il y a deux sujets à mettre sur la table : la politique de la Banque centrale européenne, en intégrant la croissance et l'emploi dans ses statuts ; et l'élaboration d'une initiative européenne de croissance, qui pourrait prendre la forme d'un grand emprunt européen. On pourrait ainsi établir un plan de relance des investissements publics, allant de pair avec une politique de change plus réaliste !

L'idée d'un gouvernement économique européen semble aussi revenir en force...
C'est vrai, tout le monde l'évoque, mais il faut savoir de quoi on parle. Car si l'on pense, comme M. Van Rompuy, au seul budget communautaire européen, celui-ci n'est pas significatif. Il représente 1 % du PIB européen. C'est la politique des États nationaux, notamment sur le plan salarial, budgétaire et monétaire, qui doit changer. C'est donc la cohérence du dispositif actuel qui est à revoir.

De quelle façon pourrait-on s'y prendre ?
Si nous n'agissons pas rapidement, nous irons vers des difficultés grandissantes : après la Grèce, ce sera le tour du Portugal, de l'Espagne ou de l'Italie, et nous risquons d'assister à l'éclatement de la zone euro, ce que je ne souhaite pas. Il faut donc organiser une nouvelle conférence européenne institutionnelle, pour revisiter, de fond en comble, le traité. Il faudra par exemple se doter d'un véritable gouvernement économique européen. Une solution raisonnable serait de travailler au niveau de l'Eurogroupe, à 16 pays et non à Vingt-Sept. Mais son président, Jean-Claude Juncker, ne me parait pas être la bonne personne pour définir une politique économique profondément renouvelée. De manière plus générale, l'ensemble du personnel politique européen est aujourd'hui prisonnier d'une doxa dépassée.

Vous étiez un opposant de première heure au traité de Maastricht. À constater les difficultés dans la zone euro, vous devez boire du petit lait ?
Je ne peux pas trouver de source de satisfaction dans les malheurs de mon pays. Il faut reprendre les choses à la base et remettre l'ouvrage sur le métier à travers une conférence institutionnelle européenne.

Vous sentez-vous plus écouté aujourd'hui ?
On est très loin psychologiquement de l'état d'esprit qui pousserait à des changements profonds. Nicolas Sarkozy me paraît trop soucieux que la France colle le plus possible à son partenaire allemand...

Propos recueillis par Éric Chol

Voir l'entretien sur le site de La Tribune

(Cet entretien est paru dans cette version sur le site Internet de La Tribune le 13 février 2010 et dans une version réduite dans La Tribune le 15 février 2010)


Rédigé par Chevenement.fr le Samedi 13 Février 2010 à 09:26 | Lu 6052 fois



1.Posté par Hadrien le 13/02/2010 16:36
Au moment où Joseph Stiglitz vient commenter en France le contenu de son dernier ouvrage, “Le triomphe de la cupidité”, qui met en cause la responsabilité des agents bancaires et financiers dans le nouveau désordre monétaire, Jean Peyrelevade n’en démord pas: “Les banques n’y sont pour rien!…Ce sont les clients, pas les banques, qui choisissent les profils de gestion, plus ou moins dynamiques …On voit bien que le mouvement est un mouvement profond du marché lui-même. ”
Il s’agit maintenant d’expliquer au peuple que c’est à lui de se serrer la ceinture pour éponger les dégats: il faut bien que s’applique la loi d’airain du libéralisme selon laquelle on mutualise les pertes et on privatise les gains en faisant payer aux pauvres les errements des riches. Et l’on est donc reparti comme avant, où l’on commencera par s’attaquer aux Etats les plus vulnérables de l’Union Européenne.
Il fallait voir à ce sujet hier soir, sur la chaîne boursière “Bloomberg”, la mine réjoui des analystes anglo-saxons (dont l’un à fort accent britannique) de nouveau sur la sellette pour expliquer au monde de la finance la vulnérabilité de l’UE et comment les “PIGS” allait le payer cher.

Cela nous offre l’opportunité de renouer avec le fil des évènements depuis l'origine, déjà brièvement évoqués sur ce blog:
C’est en effet en Janvier 1973, sous l’égide de Pompidou, ancien banquier du Groupe Rotschild, et de son ministre des finances Giscard d’Estaing, de façon presque concomitante à l’entrée du Royaume Uni dans l’Europe d’alors, que fut adoptée la loi interdisant à l’Etat Français de se financer auprés de la Banque de France. Contrairement à ce qui se faisait jusqu’alors, cette loi fit obligation à l’Etat Français de s’adresser désormais au secteur bancaire marchand, moyennant un intérêt versé à ce dernier.
Beaucoup d’observateurs ne virent là qu’un jeu d’écritures, tant que notre secteur bancaire restait nationalisé, comme l’avaient voulu De Gaulle et les Communistes à la Libération. Mais cela ne resta pas longtemps en l’état, comme on s’en aperçut trés vite.
L’opération fut d’abord inscrite, en 1992, dans le marbre du traité de Maastricht, sous l’égide de Delors et aux bons soins de Lamy, son Directeur de cabinet, qui se retrouva deux ans plus tard Directeur du Crédit Lyonnais pour en préparer la privatisation. Entre temps, le nouveau ministre des finances Balladur, ancien proche de Pompidou dont il avait dirigé le cabinet, procéda aux premières privatisations, celles des banques en priorité, dès 1993. L’opération fut parachevée par Strauss-Kahn, qui s’en fit le plus zélé protagoniste au sein du gouvernement Jospin, de sorte que ce dernier restera comme le gouvernement ayant le plus privatisé en France!
Il en découle, depuis 1993, que la dette publique, jusque là effacée par son retour d’intérêts dans le giron de l’Etat, et avant cela par émission pure et simple, s’accumule aujourd’hui en EUros au bénéfice de banquiers privés et constitue la plus gigantesque rente versée au grand capitalisme, au point que les intérêts cumulés ne sont pas loin de rejoindre le montant de la dette elle-même (1200-1300 Milliards d’Euros). Cette rente représente chaque année, comme on le sait, un montant devenu depuis peu supérieur à la totalité de l’impôt sur le revenu. En d’autres termes, sans ce monstrueux cadeau volontaire versé chaque année aux grands actionnaires des banques, les français pourraient s’exempter aujourd’hui de payer l’impôt sur le revenu (et il resterait encore un solde positif)!
Cette disposition, on l’a vu, découle d’un plan savamment conduit par des personnalités au coeur du système financier et bancaire (Pompidou, Lamy, Balladur, Strauss-Kahn). Il serait évidemment risible de prétendre qu’ils ignoraient les conséquences de leurs actes, puisque c’est ce but même qui était visé: les intérêts privés faisant main basse sur l’Etat lui-même, en percevant l’impôt à sa place!

A ceux qui douteraient de la véracité des faits, je conseille vivement d’écouter en direct l’entretien radiophonique podcasté de André-Jacques Holbecq à propos de son ouvrage “la dette publique : une affaire rentable” (Editions Yves Michel, 2008)
http://www.dailymotion.com/video/x6vy8m_la-dette-publique-une-affaire-renta_news

Cela rappelle, avec une certaine ironie, les propos prononcés par Galbraith en 1992:
“Telles sont les exceptions que fait la majorité satisfaite à sa condamnation globale de l’Etat en tant que fardeau: dépenses qui profitent aux riches, sauvetages financiers, dépenses militaires et remboursements d’intérêts…Quant aux dépenses de prestations sociales, de logements sociaux, de soins médicaux pour ceux qui n’ont aucune protection, de l’enseignement public, etc. voilà ce que l’on perçoit comme le “fardeau de l’Etat”. Le fardeau, c’est uniquement ce qui correspond aux intérêts des citoyens extérieurs à la majorité satisfaite; c’est, vérité incontournable, ce qui sert les pauvres.”
(John Kenneth Galbraith)

Le comble fut atteint lors de la récente crise financière. Ainsi naquit la bulle des “subprime”, sa provenance des Etats-Unis sous paquet-cadeau d’”ingénierie financière” étant, à elle-seule, un gage prometteur de succés pour tous les “winners” du milieu bancaire.
Mais c’est la suite qui fut des plus cocasses, en Europe, et notamment en France: les pertes abyssales encourrues réveillèrent soudainement chez ces plus ardents défenseurs du “laisser-faire” une âme interventionniste qu’on ne leur connaîssait pas. Le milieu politique lui-même parut un instant transfiguré: ainsi notre président, à peine remis de ses dévotions en terre ultra-libérale auprés de son homologue Bush, ne trouva pas moins de 360 Milliards de garantie pour les banques, si celles-ci s’avéraient d’aventure génées aux entournures, sans compter la part de recapitalisation immédiate, sans prise de participation au capital…

Ici, c’est la parole de Gramsci qui se rappelle à nous:
“C’est ainsi qu’on affirme que l’activité économique est propre à la société civile et que l’Etat ne doit pas intervenir dans sa réglementation. Mais, commme dans la réalité effective, société civile et Etat s’identifient, il faut affirmer que le “libéralisme” lui-même est une “réglementation” de caractère étatique, introduite et maintenue par voie législative et coercitive: c’est un fait de volonté consciente de ses propres fins, et non l’expression spontanée et automatique du fait économique”
(Antonio Gramsci)

Certains esprits s’offusquèrent: comment pouvait-on aussi gracieusement recapitaliser les banques alors que, quelques jours auparavant, le pouvoir avait mégoté à son commissaire aux affaires sociales quelque 1,5 Milliard pour le RSA en faveur de la réinsertion des chomeurs?
La réponse ne se fit pas attendre: il suffirait que l’Etat s’endette davantage…auprés des banques, puisque la loi et le traité de Maastricht l’ont voulu ainsi.
La ficelle étant un peu grosse au regard de l’opinion, on dût préciser que le taux d’intérêt des sommes garanties aux banques serait tout de même supérieur à celui que leur verserait l’Etat. On eut alors la surprise de constater, lors de l’audition des grands banquiers devant la Commission des finances, réunie à cet effet, qu’aucun d’eux ne manifestait plus d’appétit particulier pour ces montants garantis. Le boulet était déjà loin.

Cela nous ramène à la citation que rapportait ailleurs un autre intervenant (jpcransac), émanant de notre seul “Prix Nobel d’économie” avant son décés:
“Nous ne sommes même pas dans un régime d’économie libérale mais dans la chienlit politico-économique”
(Maurice Allais)

La tyrannie croissante des grands actionnaires est suffisamment criante pour que nous n’ayons guère d’inquiétude à leur sujet. C’est la part des salaires qui est aujourd’hui de deux points inférieure à ce qu’elle était à son point bas, à la fin des trente glorieuses (1970/1974), ce qui prouve bien au passage le point de vue keynesien: un niveau insuffisant des salaires, par la panne de consommation qu’il engendre, n’a jamais relancé la croissance.
Or, c’est pourtant bien là ce que s’obstinne à développer Jean Peyrelevade, conformément à son dernier ouvrage de 2008, dont nous donnons ici un succédané du dernier chapitre:

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CHAPITRE 7 (Les voies du redressement par J. Peyrelevade) :

“LIBERER LE TRAVAIL:
La première mesure consiste à libérer le travail…je veux dire le libérer vraiment en mettant fin aux trente cinq heures, sans avoir à payer pour cela des milliards d’euros d’argent public.
On a vu ce qu’était la solution: il suffit de renvoyer au dialogue contractuel entre partenaires sociaux les décisions relatives à la durée du travail et surtout à sa rémunération, point sur lequel Nicolas Sarkozy, tout à sa volonté de distribuer du pouvoir d’achat, demeure figé. Ne resteraient comme instruments centraux, interprofessionnels, à la main de l’exécutif et/ou du législateur, qu’une durée maximale du travail qui serait d’ordre public (aujourd’hui 48 heures par semaine en vertu d’une directive européenne) et le SMIC.” (p.169)
“RETABLIR LES FINANCES PUBLIQUES:
L’objectif central est de déplacer de quelques points, trois à quatre, en faveur des entreprises et donc au détriment provisoire des ménages, le partage de la valeur ajoutée…
La remise en ordre de l’appareil productif passe nécessairement par un prélèvement sur le pouvoir d’achat des ménages (à nouveau, qui d’autre pourrait payer une telle opération?)… Année aprés année, avec une sorte de tranquillité opininiâtre, il convient de modifier à la marge la répartition de la valeur ajoutée, du PIB, de façon à en laisser une part un peu plus fournie aux entreprises, un peu moins grande aux ménages.” (p.169-171)
“Si l’on entend vraiment déplacer des entreprises aux ménages un curseur de charges mal réglé, la hausse des taux de certains prélèvements est incontournable.” (p.173)
“DIMINUER L’IMPÔT SUR LES SOCIETES:
On peut ainsi réver à une sorte d’utopie fiscale. Supposons que l’on réduise à rien l’impôt sur les sociétés qui est actuellement du tiers du bénéfice imposable. Les marges brute et nette de l’entreprise sont augmentées du montant de l’impôt supprimé.” (p.179-180)
“Cette utopie permettrait de résoudre au passage l’énigme déjà rencontrée de l’arbitrage fiscal entre le travail et le capital. L’entreprise…, il s’agit, en tout état de cause d’une charge pour elle. Exonérons-la de toute taxation à ce titre et les revenus du capital, quelle qu’en soit la forme (loyers, intérêts, dividendes ou plus-values), devraient être soumis à des prélèvements fiscaux et sociaux identiques. Vaut-il mieux imposer les revenus du capital ou ceux du travail? L’arbitrage fiscal, à partir du moment où l’on n’y mêle plus les entreprises, exercé au sein de la catégorie des seuls ménages, prend alors tout son sens, économique et politique.” (p.181-182)

On retrouve bien là une antienne chère à l’auteur, de la même veine que “Les banques n’y sont pour rien”: l’impôt, les entreprises n’ont rien à y voir! (Elles n’utilisent, c’est bien connu, aucune infrastructure publique, ne doivent rien à l’Etat, et peuvent d’ailleurs être toutes logées à la même enseigne dans cette admnistie générale, tant les différences entre PME et grandes entreprises sont infimes…)
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Soyons juste: chez Jean Peyrelevade, le banquier n’est pas totalement aveugle sur nombre de réalités. A preuve, ce passage du Chapitre “Les actionnaires: qui sont-ils?”:
” Là est le changement décisif: alors que la détention directe d’actions par les individus s’accompagnait le plus souvent d’une dilution du contrôle exercé par les apporteurs de capital et laissait le pouvoir à la direction de l’entreprise, la concentration des titres dans les mains d’une nouvelle catégorie d’institutions, les gestionnaires de fonds, soumis par la concurrence et la règlementation à un devoir de bonne gestion des intérêts des épargnants (les futurs retraités), a transformé profondément la nature des relations entre mandants et mandataires dans un capitalisme anglo-saxon dont les bases financières se sont simultanément beaucoup élargies.”
De même écrit-il, sur l’Europe de plus en plus libérale:
” En Europe, depuis plus de vingt ans, les prélèvements augmentent sur la consommation (TVA) et le travail (revenus des salariés), facteurs qui ont pour caractéristique commune de ne pas se déplacer facilement, tandis qu’ils diminuent sur le capital, aisément délocalisable. Moins d’impôts sur le capital et plus sur le travail, moins sur les entreprises et plus sur les salariés: ainsi les Etats contribuent-ils à leur tour au renforcement du modèle dominant.”
Ou encore, dans “Le rôle de l’Etat (3)”:
“Les banques, devenues universelles et attirées par l’appât du gain, se précipitèrent vers les risques de marché. L’interpénétration des métiers fit que le cloisonnement qui protégeait les banques de dépôt disparut. La faillite de Lehman prit un caractère systémique parce que cette banque d’investissement était massivement refinancée par le système bancaire classique.
Ne faut-il pas rétablir des cloisons étanches ? Ne doit-on pas, dans une version modernisée du Glass-Steagall Act, interdire aux banques de dépôt toute prise de risque pour compte propre sur les marchés, où elles ne pourraient plus intervenir que comme mandataires de leurs clients ? Le débat, ouvert dans la communauté académique américaine, a été spectaculairement relayé par les autorités régulatrices du Royaume-Uni, avec les déclarations de lord Adair Turner, président de
la Financial Services Authority, et surtout de Mervyn King, gouverneur de
la Bank of England:
- Comment se fait-il que l’Europe continentale, adepte d’une régulation forte du capitalisme financier, se désintéresse de la question ? Comment expliquer que la France, qui se prétend à la pointe de l’action commune, ne fasse rien pour que cette solution, radicale mais robuste, soit au moins discutée ? ”
et J. Peyrelevade de conclure:
« La banque, gardienne obligée de la monnaie qu’elle émet, n’exerce pas une activité marchande comme les autres mais est un vrai service public qui devrait être géré comme tel. On en est loin »

Fallait-il que le boulet fût passé prés pour qu’un trés libéral britannique réclame ardemment l’intervention étatique de la France, et qu’un banquier démocrate-chrétien en appelle à plus de règlementation et de protection par l’Etat en invoquant la mission de service public….aprés avoir censuré sur son blog la citation d’un passage de Jean Luc Melenchon et y avoir écrit “l’illusion collectiviste” !

Dans tout cela, où est la cohérence de qui se voudrait “ni à droite, ni à gauche”?

2.Posté par Elie Arié le 15/02/2010 18:02
Le seul avantage de la ratification du traité de Lisbonne est d'apporter la preuve qu'il ne peut pas marcher...Une direction tricéphale de l' UE ( le Président, le pays qui dirige l' UE, le Président de la Commission), une Ministre des Affaires Étrangères qui ne peut pas coordonner des diplomaties divergentes de chaque Etat, et, maintenant (ça vient de sortir...) l'idée d'un Ministre des Finances de l' UE (ou de la zone Euro? on ne le sait pas au juste...) alors qu'il n'y a pas de gouvernement économique de l'UE ni de remise en cause de l'indépendance de la BCE...Si le ridicule tue, le traité de Lisbonne ne devrait pas tarder à rendre l'âme (s'il en a une).

La démonstration par l'absurde est toujours probante et souvent amusante: mais était-elle indispensable?

3.Posté par RESTIER Fabrice le 15/02/2010 19:12
Faut quand même faire attention à ce que des expressions du style « gouvernement économique de la zone euro » ne cachent pas des mesures comme « l’impôt européen » et la levée de l’impôt par les institutions européennes directement sur chaque citoyen de l’Union.
Cela signifierai la fin de la souveraineté fiscale des états nations inscrite dans la Constitution (française, j’entends…) !

On pourrait s’attendre à ce que le si républicain Chevènement abhorre cette idée, et pourtant on peut lire ceci dans un de ses discours en date du 28 septembre 2005 :
« On ne peut pas aborder ces problèmes de coordination économique sans avoir sérieusement réfléchi à ce que leur solution présuppose de convergence politique.
Je veux bien qu’on aille vers un impôt européen mais il faut savoir que des transferts très importants s’opèrent déjà au sein de l’Europe et je ne suis pas sûr que les pays contributeurs nets soient prêts, aujourd’hui, à aller beaucoup plus loin. La France acquittera en 2006 une cotisation de 17 Milliards d’euros au budget européen Il faut avoir conscience que ceci se traduit par une certaine dépression sur le plan économique. Par conséquent, il faut imaginer quelque chose, peut-être un impôt européen. De toute façon, il faudra financer, au titre de la politique régionale, non seulement les pays d’Europe centrale et orientale mais aussi les pays méditerranéens pour lesquels une transition est nécessaire.
» (Source : http://www.fondation-res-publica.org/L-avenir-de-l-Euro-conclusions-de-Jean-Pierre-Chevenement_a90.html )

En une vingtaine d’année, nous sommes passés de l’Europe de la paix et de la coopération industrielle à celle du dumping et du déclassement social.
Est-ce réellement le moment de faire confiance à ces institutions là pour leur transférer un domaine de souveraineté supplémentaire, la fiscalité, et leur confier la gouvernance économique ???

4.Posté par BA le 16/02/2010 21:40
Les Français n'ont jamais autant regretté le franc.

L'euro est-il un bouc émissaire en ces temps de crise ? Près de 69 % des Français disent regretter le franc, selon un sondage Ifop pour Paris Match publié ce mardi.

Surtout, 47 % des personnes interrogées disent le regretter «beaucoup», 22 % le regrettent «un peu» et 31 % «pas du tout».

La nostalgie n'a jamais été aussi forte depuis l'introduction de l'euro, le 1er janvier 2002.

En février 2002, seuls 39 % regrettaient le franc, et en juin 2005, 61 %, selon les sondages Ifop.

http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2010/02/16/04016-20100216ARTFIG00701-les-francais-n-ont-jamais-autant-regrette-le-franc-.php

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